Opinion:  »L’augmentation du prix du carburant ne peut pas et ne doit pas rendre fou » (Par Abdoulaye Sankara)

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Les manifestations contre le réajustement du prix du carburant à la pompe vont coûter encore plus cher à la Nation. Les casseurs ont concassé leur propre présent et pourraient compromettre leur futur, s’ils continuent. Les tracas du pouvoir découlent simplement de son devoir de faire face aux dégâts, mais les désagréments vont se répercuter durement sur les casseurs et sur leurs ayants droit.

Certes, ce type de guérilla urbaine n’est pas propre aux Guinéens (la télévision montre chaque jour des échauffourées entre forces de l’ordre et manifestants quelque part en Afrique ou dans le reste du monde), mais au-delà du mimétisme, il y a lieu de se demander si le saccage des biens publics et privés est la forme idoine de revendication. L’augmentation du prix du carburant ne peut pas et ne doit pas rendre fou. Point n’est besoin d’être un partisan du pouvoir pour admettre que l’éternel recommencement dans la réparation ou la réinstallation des équipements ne permet pas d’avancer dans le sens du progrès souhaité par tous. A longueur de journée, dans les colonnes des journaux et sur les antennes des radios, des citoyens organisés ou non ne cessent de déplorer le manque de caniveaux ou de voies d’accès à leurs domiciles. Les efforts d’amélioration du cadre de vie sont en somme jugés insuffisants. Et paradoxalement, c’est ce qui est insuffisant qui est anéanti dans des opérations de casses sans conscience qui n’engendrent que des ruines dans un contexte où tout est à bâtir.

Il est vrai que la récente manifestation n’a pas engendré des casses, mais avant cette dernière, que de dégâts. Dans cette affaire que des villes de la Guinée ont vécu, manifestement, le gouvernement s’est laissé déborder, mais les organisations de la société civile et les syndicats ont montré leurs limites. Ces derniers, en effet, n’ayant lancé aucun mot d’ordre de casse, qui a alors organisé ? Si, sur des questions d’importance capitale et d’envergure nationale comme la hausse du prix des produits pétroliers, des citoyens peuvent faire des sorties sans se soucier de le faire dans un cadre organisé, il y a lieu de se demander qu’elle est la place et qu’elle est la crédibilité de ces structures. Il y a comme un déficit d’encadrement et de formation en matière de leçon de chose civique. Le dialogue social prôné comme antidote aux manifs violentes n’aura de sens et de chances que si les organisations civiles sont elles-mêmes écoutées et suivies par les populations. La passivité de la population face aux actes de vandalisme est parfois déconcertante.

Certes, demander à cette population victime de faire face aux meutes pourrait être le prétexte à des rixes aux dégâts humains inconsidérables. Mais étant donné qu’un vandale, même orphelin de père et/ou de mère, est tout de même le parent de quelqu’un dans ce pays, un simple rappel à la discipline serait d’un grand apport dans la moralisation des actes de revendication. L’esprit citoyen se forme at home. Sinon, gare à l’influence de l’école de la rue.

Abou Maco

Journaliste

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